La position de l’Égypte face aux défis géopolitiques récents est des plus délicates. Le pays, déjà pris dans une toile d’araignée complexe d’alliances et de tensions, doit désormais naviguer entre la guerre à Gaza et les propositions controversées de l’ex-président américain Donald Trump. Un scénario qui pourrait redéfinir son avenir au Moyen-Orient.
Une dépendance géopolitique qui date de plusieurs décennies
L’Égypte entretient une relation économique et militaire forte avec les États-Unis depuis des décennies, principalement grâce à l’aide financière. Depuis la signature du traité de paix avec Israël en 1979, le pays bénéficie d’un soutien de 1,5 milliard de dollars annuels, dont la majorité est consacrée à l’acquisition de matériel militaire. Cette aide est cruciale pour maintenir la stabilité du régime de Sissi, tout en consolidant les objectifs géostratégiques américains dans la région.
Mais l’histoire a montré que l’Égypte sait gérer les moments de tension avec ses alliés. Après les bouleversements politiques de 2013, le pays a su diversifier ses relations et réduire sa dépendance à l’aide américaine, en se rapprochant de nouveaux partenaires comme la Russie et la France, tout en renforçant ses liens avec l’Arabie Saoudite et les Émirats Arabes Unis.
La quête de l’équilibre : Israël, le monde arabe et les États-Unis
L’Égypte a toujours été à l’intersection des grandes dynamiques régionales. Son rôle de médiateur entre Israël et le monde arabe, tout en préservant ses intérêts avec les États-Unis, est une ligne de crête qu’elle doit constamment maintenir. Cette politique a été marquée par des moments de tension, comme en 1982 et 2006, lors des agressions israéliennes contre le Liban et Gaza, où l’Égypte a condamné ces actions tout en préservant une paix fragile avec Israël.
Aujourd’hui, sous la direction de Sissi, l’Égypte continue de naviguer avec prudence. Cependant, la guerre en cours à Gaza menace de perturber cet équilibre déjà fragile. Le Caire craint que la situation ne dégénère en une crise humanitaire majeure, avec des réfugiés palestiniens cherchant à fuir vers le Sinaï, une zone stratégique qui pourrait entraîner une confrontation directe avec Israël.
Gaza : une pression supplémentaire pour l’Égypte
Le déclenchement de la guerre à Gaza a exacerbé les tensions dans la région. Le Caire redoute qu’Israël cherche à déporter de force les Palestiniens vers le Sinaï, ce qui serait non seulement une violation de ses engagements passés, mais aussi une menace à la sécurité du pays. L’histoire du Moyen-Orient, marquée par des événements comme l’incident de 1955, pèse lourdement dans les décisions du gouvernement égyptien. Un tel scénario raviverait les vieux démons de la guerre et de la migration forcée, et risquerait de déstabiliser toute la région.
En plus de ces tensions politiques, l’Égypte doit également faire face à une crise économique profonde. Les pertes de revenus liées aux attaques dans la mer Rouge et à la baisse de l’activité dans le canal de Suez compliquent davantage la gestion de la situation. Le pays, déjà fragile économiquement, se trouve pris au piège entre la nécessité de maintenir sa stabilité intérieure et l’urgence d’une crise régionale.
Trump : une pression géopolitique sur le fil du rasoir
La proposition de Trump de relocaliser les Palestiniens en Égypte ou en Jordanie place le pays dans une position encore plus inconfortable. Accepter cette solution reviendrait à rompre avec une tradition de soutien à la cause palestinienne, une ligne rouge pour de nombreux Égyptiens. Le rejet de cette proposition, en revanche, pourrait dégrader les relations avec les États-Unis et mettre en péril le soutien international dont dépend le régime de Sissi.
Dans ce contexte, l’Égypte se trouve à un carrefour stratégique, où chaque décision pourrait avoir des conséquences profondes non seulement pour sa politique interne, mais aussi pour l’équilibre géopolitique du Moyen-Orient.
La Rédaction