À moins d’un an de l’élection présidentielle au Cameroun, la scène politique s’agite, et une nouvelle dynamique semble émerger du cœur de l’Église. Des figures influentes du clergé catholique, notamment autour de l’archevêque de Douala, se sont récemment fait entendre en exigeant le départ du président Paul Biya, au pouvoir depuis plus de 40 ans. Ces voix religieuses, qui jusqu’à présent se tenaient souvent en retrait des batailles politiques, semblent désormais prêtes à jouer un rôle plus affirmé dans le processus politique du pays.
L’appel des prélats : Un cri de détresse
Les appels à la démission de Biya, portés par ces hommes d’Église, ne sont pas qu’une simple contestation. Ils incarnent un ras-le-bol croissant face à une gestion jugée autoritaire, ainsi qu’une volonté de promouvoir un changement nécessaire pour l’avenir du pays. Leur position est d’autant plus significative qu’elle survient dans un contexte de crise économique, sociale et sécuritaire, notamment avec la guerre en zone anglophone et la montée des tensions politiques.
L’archevêque de Douala, Mgr Samuel Kleda, figure emblématique de cette fronde, est l’un des plus ardents défenseurs de cette posture. Ses prises de parole publiques, où il critique ouvertement l’action du gouvernement, ont résonné comme un signal de mobilisation pour de nombreux Camerounais, lassés de décennies de pouvoir autoritaire. Mgr Kleda n’est pas seul dans cette démarche ; d’autres membres influents du clergé, de Yaoundé à Bafoussam, se joignent également à cet appel au changement.
Le poids spirituel du clergé : un facteur déterminant
L’implication de ces figures religieuses dans le débat politique n’est pas anodine. Le clergé catholique jouit d’une grande influence au Cameroun, notamment dans les zones rurales, où de nombreuses communautés se tournent vers l’Église pour des conseils spirituels et sociaux. La position des prélats pourrait bien mobiliser un large éventail de la population, particulièrement dans un contexte où la question du leadership politique et de la gouvernance est au centre des préoccupations.
Cette prise de position forte intervient également à un moment où le Cameroun fait face à des défis majeurs, que ce soit sur le plan économique, avec une pauvreté qui touche une large part de la population, ou sur le plan politique, avec une opposition fragilisée mais qui voit dans ce soutien du clergé un allié stratégique pour secouer les bases du pouvoir actuel.
Un nouveau chapitre pour la politique camerounaise ?
L’attitude du clergé anti-Biya pourrait bien marquer un tournant dans l’histoire politique du Cameroun. Historiquement, l’Église catholique a joué un rôle crucial dans les moments de crise, mais elle est restée en dehors des batailles partisanes. En prenant position contre Biya, ces figures religieuses risquent de provoquer une fracture au sein de l’Église, où d’autres prélats plus modérés continuent de prôner la réconciliation et le dialogue, quitte à jouer les médiateurs entre l’opposition et le pouvoir.
Cependant, cette prise de position pourrait aussi renforcer la pression populaire pour un changement, particulièrement parmi les jeunes générations qui ne connaissent que le régime Biya et qui sont de plus en plus nombreux à réclamer une réforme profonde du système politique du pays.
Vers une mobilisation citoyenne ?
La montée en puissance de ces voix religieuses anti-Biya marque peut-être le début d’une mobilisation plus large au Cameroun, où la société civile et les institutions religieuses pourraient jouer un rôle majeur pour pousser vers un changement. Avec l’élection présidentielle de 2025 qui approche, il sera intéressant de voir si ces appels se transforment en une force politique réelle, capable de bousculer l’ordre établi et de redéfinir la trajectoire du pays.
La Rédaction