Vendredi 16 mai 2025, N’Djamena. L’ancien Premier ministre tchadien et président du parti d’opposition Les Transformateurs, Succès Masra, a été arrêté à l’aube à son domicile par des membres des forces de sécurité, sans qu’aucune justification officielle ne soit rendue publique. Cette arrestation surprise, qui intervient dans un contexte politique encore instable, ravive les tensions dans la capitale.
Une interpellation musclée à l’aube
C’est dans le quartier Gassi, au VIIe arrondissement de N’Djamena, que les événements se sont déroulés. Selon les proches de l’opposant, une unité armée a pris d’assaut son domicile vers 5 heures du matin. « Ils sont arrivés en nombre, très armés, ils ont encerclé la maison, l’ont fouillée, puis l’ont embarqué sans explication », témoigne un de ses lieutenants joint par RFI.
Depuis, aucune communication officielle n’a été émise par les autorités tchadiennes. Le silence qui entoure cette arrestation suscite l’inquiétude et l’indignation dans les rangs de l’opposition et au sein de la société civile.
Un opposant qui dérange
Succès Masra, figure emblématique de l’opposition, avait brièvement occupé le poste de Premier ministre de transition après avoir signé un accord de réconciliation avec le régime militaire. Il avait ensuite présenté sa candidature à l’élection présidentielle du 6 mai 2024. Malgré sa défaite officielle — le président Mahamat Idriss Déby Itno ayant été déclaré vainqueur avec plus de 61 % des voix — Masra a toujours contesté les résultats, affirmant détenir la majorité des suffrages.
Après avoir saisi sans succès le Conseil constitutionnel pour contester l’élection, il avait annoncé sa démission du gouvernement le 22 mai 2024, dénonçant un « processus électoral biaisé » et un retour aux pratiques autoritaires.
Des lendemains d’élections toujours flous
Depuis sa démission, le climat politique au Tchad reste tendu. L’opposition accuse le pouvoir de verrouiller l’espace démocratique et de réprimer les voix dissidentes. Les Transformateurs, le parti de Masra, ont récemment appelé à une « nouvelle transition politique », jugeant que les élections n’avaient rien réglé sur le fond.
L’arrestation de leur chef ce 16 mai est donc interprétée comme un acte de répression supplémentaire, voire comme une tentative d’intimidation. Des rassemblements spontanés commencent à s’organiser à N’Djamena, bien que la peur d’une répression violente demeure forte dans les esprits.
Une arrestation lourde de symboles
L’absence d’informations sur la localisation et l’état de santé de Masra alimente les spéculations. Plusieurs ONG locales et internationales ont commencé à alerter sur la nécessité d’obtenir rapidement des nouvelles de l’opposant, mettant en garde contre une éventuelle disparition forcée.
Dans un pays encore marqué par l’héritage autoritaire de la dynastie Déby, cette arrestation pourrait bien devenir un nouveau point de rupture. Pour de nombreux Tchadiens, l’interpellation brutale d’un leader politique pacifique rappelle les heures sombres de la répression politique.
L’heure est désormais à la mobilisation, non seulement pour connaître la vérité sur le sort de Succès Masra, mais aussi pour préserver les fragiles acquis démocratiques du pays.
La Rédaction

