L’ancien président Joseph Kabila est arrivé à Goma, dans l’est de la République démocratique du Congo, une ville aujourd’hui sous le contrôle du M23. Son retour spectaculaire, au cœur d’une région en guerre, déclenche une riposte politique et judiciaire sans précédent de la part du pouvoir en place.
Kabila revient, la crise s’enflamme
Joseph Kabila n’est plus dans l’ombre. Après des années d’exil discret, le « Raïs » a choisi de faire son retour en RDC par la grande porte… ou plutôt par une ville tombée entre les mains des rebelles. Son arrivée à Goma, rapportée notamment par l’Associated Press et The Times, intervient alors que cette ville stratégique du Nord-Kivu est tenue par le M23, groupe armé que Kinshasa accuse d’être soutenu par le Rwanda.
L’ancien président a été aperçu à Kigali quelques jours avant son arrivée à Goma, selon Africa Intelligence. À son retour, il affirme vouloir contribuer aux efforts de paix, mais le gouvernement de Félix Tshisekedi dénonce un agenda caché et une collusion avec les rebelles.
Une rivalité ancienne, un terrain miné
L’affrontement entre Tshisekedi et Kabila ne date pas d’hier. En 2018, la passation du pouvoir s’était faite dans une alliance fragile. Mais en coulisses, les tensions n’ont cessé de croître jusqu’à la rupture totale. Depuis, l’ex-président a glissé dans l’opposition, s’érigeant en critique sévère de la gouvernance actuelle.
Son retour à Goma marque une nouvelle étape dans cette rivalité : selon Kinshasa, Kabila est impliqué dans la création de l’Alliance du fleuve Congo (AFC), une coalition politico-militaire dans laquelle figure le M23. « L’AFC, c’est lui », accuse sans détour le président Tshisekedi.
La riposte de Kinshasa : interdictions et poursuites
Le gouvernement congolais ne cache pas sa colère. Le 20 avril, il a suspendu les activités du PPRD, le parti fondé par Kabila, sur tout le territoire national. Dans un communiqué, le ministère de l’Intérieur fustige « l’activisme avéré » de Kabila et le « choix délibéré » de revenir au pays par une ville sous contrôle de l’ennemi.
Dans la foulée, le ministère de la Justice a demandé au procureur général d’ouvrir des poursuites judiciaires contre l’ancien président pour sa « participation directe » aux activités du M23. Certains groupes de jeunes du Nord-Kivu réclament même la levée de ses immunités et la révocation de sa nationalité.
Un retour qui bouleverse l’équilibre
Le retour de Joseph Kabila à Goma, dans un contexte sécuritaire délétère, dépasse le simple duel entre deux hommes. Il jette une ombre sur la fragile stabilité de la RDC, à quelques mois de nouvelles échéances électorales et alors que l’est du pays est plongé dans un chaos humanitaire et militaire.
En défiant ouvertement Kinshasa depuis une ville sous contrôle rebelle, l’ancien président relance la lutte pour le pouvoir dans un pays où l’État peine à asseoir son autorité. Le brasier congolais vient de gagner un nouveau foyer d’incendie.
La Rédaction

