La récente initiative du Premier ministre hongrois Viktor Orbán suscite l’inquiétude à Bruxelles. En ouvrant la voie à l’immigration de travailleurs russes et biélorusses, Orbán semble prendre ses distances avec l’Union européenne, provoquant des craintes quant à la sécurité de l’espace Schengen.
Un programme d’immigration controversé
Début juillet, Viktor Orbán a rencontré Vladimir Poutine pour discuter de la situation en Ukraine. Cette rencontre a été suivie par l’annonce d’un programme d’immigration hongrois permettant aux ressortissants russes et biélorusses de résider en Hongrie pour une période initiale de deux ans, prolongeable jusqu’à cinq ans. Ce programme pourrait même aboutir à l’obtention d’un permis de séjour permanent.
Bruxelles redoute que ce dispositif ne facilite l’infiltration d’espions et de saboteurs russes au sein de l’espace Schengen, remettant en cause la sécurité de l’Union européenne. La commissaire européenne aux affaires intérieures, Ylva Johansson, a qualifié cette initiative de risque potentiel pour la sécurité de l’UE, et des mesures sont en cours d’évaluation.
La réaction de l’Union européenne
Les dirigeants du Parti populaire européen (PPE), le plus grand groupe politique du Parlement européen, exigent que cette question soit abordée lors du prochain sommet de l’UE. Ils appellent à des actions fermes pour préserver l’intégrité de l’espace Schengen et éviter que d’autres États ne suivent l’exemple hongrois en ouvrant leurs portes aux ressortissants russes et biélorusses.
En parallèle, la Hongrie durcit sa politique à l’égard des réfugiés ukrainiens. Ceux provenant de régions jugées « sûres » en Ukraine perdent leur statut de protection et sont contraints de quitter le pays. À ce jour, environ 46 000 réfugiés ukrainiens se trouvent en Hongrie, un chiffre nettement inférieur à celui des autres nations européennes.
Un éloignement croissant des valeurs européennes
Depuis plusieurs années, les tensions entre l’UE et la Hongrie se sont intensifiées. L’Union européenne a constaté des violations graves de l’État de droit en Hongrie, notamment en ce qui concerne l’indépendance du système judiciaire, la lutte contre la corruption, la liberté de la presse et la séparation des pouvoirs. En conséquence, environ 20 milliards d’euros d’aides européennes ont été gelés.
Ulf Brunnbauer, directeur scientifique de l’Institut Leibniz pour la recherche sur l’Europe de l’Est et du Sud-Est, affirme que la Hongrie, sous la direction de Viktor Orbán, s’est éloignée des valeurs fondamentales de l’UE. Selon lui, la Hongrie ne pourrait plus rejoindre l’Union aujourd’hui, car elle ne répond plus aux critères démocratiques et juridiques requis.
Un avenir incertain au sein de l’UE
Malgré ces divergences, une exclusion de la Hongrie de l’UE n’est pas envisageable. Les traités européens ne prévoient pas l’exclusion d’un État membre, et la sanction la plus sévère, la suspension des droits de vote, nécessite une unanimité qui semble hors de portée. Par ailleurs, une sortie volontaire de l’Union n’est pas non plus à l’ordre du jour, les fonds européens étant cruciaux pour l’économie hongroise.
Viktor Orbán semble donc miser sur une autre stratégie : rassembler suffisamment de soutiens au sein de l’Union pour remodeler l’Europe selon ses propres aspirations.
La Rédaction