Le Japon vient de tourner une page historique. Le 21 octobre 2025, la députée conservatrice Sanae Takaichi a été élue Première ministre, devenant ainsi la première femme à diriger le gouvernement du pays. Une victoire hautement symbolique dans une nation où la politique a longtemps été considérée comme un domaine réservé aux hommes.
Un moment historique pour l’archipel
La nomination de Sanae Takaichi marque une rupture dans un pays classé parmi les plus en retard en matière de parité. Le Japon occupe encore le 118ᵉ rang sur 148 au classement mondial de l’égalité des genres publié par le World Economic Forum. Dans les cercles du pouvoir, les femmes demeurent rares : moins de 10 % des députés de la Diète et à peine une poignée de ministres.
Connue pour ses convictions conservatrices et son style direct, Takaichi n’a pourtant jamais revendiqué un combat féministe. Mais son accession au poste suprême envoie un signal fort : celui d’un Japon qui, lentement, commence à s’ouvrir à une représentation plus équilibrée, sans renier ses traditions politiques.
Les grands défis qui attendent Sanae Takaichi
1. Stabiliser une majorité fragile
Bien qu’elle dirige le Parti libéral-démocrate (PLD), Sanae Takaichi ne dispose pas d’une majorité solide à la Diète. Sa coalition avec le Japan Innovation Party demeure fragile, ce qui l’obligera à nouer des compromis permanents avec l’opposition pour faire avancer son programme. Cette instabilité pourrait freiner les réformes promises et tester sa capacité à fédérer au-delà des lignes partisanes.
2. Redynamiser l’économie japonaise
La Première ministre hérite d’une économie à la croissance atone, d’un yen affaibli et d’une inflation persistante. Inspirée par la doctrine « Abenomics » de son mentor Shinzo Abe, elle prévoit de relancer l’investissement public et de stimuler la consommation intérieure. Mais elle devra aussi maîtriser la dette publique, déjà l’une des plus élevées du monde, tout en protégeant le pouvoir d’achat des ménages.
3. Naviguer dans une Asie en tension
Sur le plan international, Takaichi devra gérer un environnement stratégique complexe. Elle s’est engagée à renforcer la défense nationale, notamment face aux ambitions croissantes de la Chine et aux provocations de la Corée du Nord. Son alliance avec les États-Unis restera centrale, mais elle devra trouver un équilibre entre fermeté militaire et diplomatie régionale.
Le défi du genre : entre symbole et résistance culturelle
L’élection de Sanae Takaichi dépasse la seule dimension politique : elle interroge une culture où le pouvoir reste majoritairement masculin. Dans les grandes entreprises comme dans les institutions publiques, la présence féminine aux postes de décision demeure limitée. Les normes sociales et les attentes traditionnelles continuent d’influencer la manière dont les femmes sont perçues lorsqu’elles occupent des fonctions d’autorité.
Takaichi arrive donc à un moment charnière. Sa réussite pourrait redéfinir le rôle des femmes dans la vie publique japonaise et inspirer une nouvelle génération. Mais elle devra aussi composer avec un environnement institutionnel conservateur, où les changements culturels s’opèrent lentement. Plus qu’un symbole, son mandat sera un test : celui de la capacité du Japon à conjuguer modernité et héritage social.
Une mission à double portée
Pour Sanae Takaichi, chaque décision comptera davantage que son image de pionnière. Elle devra prouver qu’une femme peut gouverner avec autorité dans un système politique conçu depuis des décennies pour des hommes. Si elle parvient à réformer l’économie tout en ouvrant la voie à une véritable parité, elle laissera une empreinte durable dans l’histoire du Japon. Dans le cas contraire, son mandat pourrait renforcer le sentiment que le plafond de verre demeure encore difficile à briser.
La Rédaction

