Un nouvel incendie s’est déclaré dans la nuit du 1er mai 2024 au Centre togolais des expositions et foires (CETEF-Togo 2000), entraînant la fermeture d’urgence du Marché international de l’artisanat (MIATO) à Lomé. Ce sinistre s’ajoute à une série d’incendies qui frappent le Togo ces derniers mois, nourrissant l’inquiétude des citoyens et mettant en lumière les lacunes structurelles en matière de prévention des risques.
Une vague inquiétante de sinistres
Depuis le début de l’année, plusieurs incendies majeurs ont été recensés à travers le pays. En mars, un entrepôt de textiles à Kara a été ravagé par les flammes, avec des pertes évaluées à 50 millions de FCFA. En avril, le marché de Kpalimé a subi le même sort, plongeant des centaines de commerçants dans le désarroi. L’incendie du MIATO, rapidement maîtrisé, a tout de même détruit des stocks artisanaux et interrompu un événement crucial pour le secteur créatif national.
« Ces sinistres ne sont plus des cas isolés, mais des signaux d’alerte », estime Komlan Aduayom, expert en gestion des risques. Il pointe du doigt une urbanisation désordonnée, des installations électriques vétustes et l’absence de normes anti-incendie dans de nombreuses infrastructures publiques.
Les artisans, victimes silencieuses
Si l’on ne déplore aucune victime physique, les pertes humaines et économiques sont considérables. Adjoa Sika, potière originaire de Kabyè, témoigne : « Mes pièces uniques ont disparu en quelques minutes. C’était six mois de travail, six mois de dettes. » Comme elle, des dizaines d’artisans, souvent issus de milieux modestes, voient leurs efforts anéantis.
La Chambre des métiers évalue les pertes préliminaires à plus de 200 millions de FCFA. Un chiffre qui pourrait s’alourdir, d’autant que les assurances refusent fréquemment d’indemniser les œuvres artisanales non standardisées.
Des pompiers en lutte avec des moyens dérisoires
Sur le terrain, les sapeurs-pompiers sont souvent démunis. « Nos camions manquent d’eau ou de pression. Dans certains quartiers, il n’y a même pas de bouches d’incendie », confie l’un d’eux sous couvert d’anonymat. Leur intervention rapide au MIATO a évité le pire, mais le manque de matériel reste un frein majeur à leur efficacité.
Vers une stratégie nationale de prévention ?
Face à la répétition de ces drames, la société civile multiplie les appels à l’action. L’Association togolaise des consommateurs (ATC) réclame notamment :
• Un audit national des installations électriques des marchés et espaces publics ;
• Des formations obligatoires à la sécurité incendie pour les gestionnaires d’espaces collectifs ;
• Des subventions pour équiper les lieux sensibles en extincteurs et dispositifs d’alerte.
Le ministre de la Sécurité, joint par notre rédaction, a annoncé la mise en place d’un « plan d’urgence » d’ici fin juin 2024, sans toutefois en détailler le financement.
L’enjeu caché d’un développement inclusif
Ces incendies à répétition ne sont pas que des faits divers : ils révèlent une faille critique dans le développement économique du pays. « Sécuriser les biens des petits entrepreneurs, c’est protéger le tissu économique local et lutter durablement contre la pauvreté », rappelle l’économiste Folly Sessou. À l’heure où le Togo mise sur l’industrialisation et la promotion de l’artisanat, la sécurité des infrastructures reste un maillon indispensable à consolider.
La Rédaction

