Au Caire, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a récemment reçu Khalifa Haftar, figure centrale de l’Est libyen, pour un échange stratégique sur l’avenir politique de la Libye. Derrière la cordialité affichée, c’est une vision partagée de l’ordre et de la stabilité régionale qui s’est exprimée.
Un partenariat assumé
En accueillant le commandant de l’autoproclamée Armée nationale libyenne, le pouvoir égyptien réaffirme son appui à un interlocuteur qu’il considère comme un rempart contre le chaos. Le discours du Caire met en avant le respect de la souveraineté libyenne, tout en rejetant fermement les interférences étrangères et la présence de milices soutenues par d’autres puissances. L’Égypte continue ainsi de plaider pour une normalisation politique fondée sur un calendrier électoral unique, avec la tenue conjointe d’élections présidentielle et législatives.
L’ombre des ingérences
Alors que les tentatives de médiation internationales s’essoufflent, cette rencontre reflète une volonté régionale de reprendre la main sur le dossier libyen. En écho à cette dynamique, le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatti, a rappelé à la représentante de l’ONU en Libye la nécessité d’une issue pilotée exclusivement par des acteurs libyens. Une déclaration qui tranche avec l’immobilisme diplomatique ambiant.
Des enjeux plus larges
Haftar, de son côté, a salué la coopération avec Le Caire, en particulier dans le domaine du développement. Des entreprises égyptiennes participent déjà à plusieurs projets dans l’est libyen, traduisant une influence qui dépasse le strict cadre militaire. Ce partenariat s’inscrit dans une logique d’ancrage économique de l’Égypte dans son voisinage immédiat, sur fond d’instabilité chronique.
Une Libye fragmentée
Plus de dix ans après la chute de Mouammar Kadhafi, la Libye reste déchirée entre deux pôles rivaux : à l’Ouest, un gouvernement reconnu internationalement, dirigé par Abdelhamid Dbeibah ; à l’Est, un pouvoir parallèle adossé au Parlement de Tobrouk et soutenu par Haftar. Dans cet entre-deux, des milices armées poursuivent leur lutte d’influence, notamment à Tripoli. L’absence d’autorité centrale forte continue de fragiliser les tentatives de réunification du pays.
La visite de Khalifa Haftar au Caire consacre une alliance ancienne mais désormais portée par un objectif renouvelé : stabiliser la Libye par la force des urnes, tout en préservant des intérêts sécuritaires partagés. Un pari risqué, dans un pays où chaque avancée politique reste menacée par le poids des armes.
La Rédaction

